Les origines du Pourim shpil
PREMIERS TEXTES EN YIDDISH
La première inscription de langue yiddish est datée de 1272.
Le premier texte dans cette langue est vraisemblablement le manuscrit de Cambridge de 1382.
Des poèmes, chansons, monologues, parodies de drames bibliques en yiddish, dont un recueil publié à Venise dès 1555, peuvent être considérés comme des ancêtres de Pourim shpiln. En 1582, un poème dialogué écrit en yiddish, inspiré par une pièce allemande, dramatise l’histoire de Jonas : Jonas, un jeu joyeux, court et utile par Simon Rothen et Balthasar.
LA PREMIÈRE FORME DE THÉÂTRE JUIF
Apparu au XVIIe siècle dans les communautés yiddishophones d’Europe, le Pourim shpil – די פּורים–שפּיל – est longtemps la seule expression théâtrale que les Juifs s’autorisent. Sa forme originelle est une saynète inspirée du récit biblique du Livre d’Esther, jouée dans les maisons aisées par des acteurs improvisés à l’occasion de la fête de Pourim.
Sorte de « carnaval juif », Pourim inspirait depuis longtemps des chansons joyeuses et des parodies, caractérisées par l’irrévérence voire la paillardise. Ces éléments, passés dans le Pourim shpil, suscitent l’opposition de rabbins et dirigeants communautaires, surtout dans les communautés d’Allemagne et de Bohême, où des formes profanes commencent à lézarder l’édifice de la stricte observance.
L'Âge d'or du Pourim shpil
A partir de la fin du XVIIe siècle sont publiées de véritables pièces de théâtre, qui se jouent dans des cours de maisons ou de synagogues. Ces drames bibliques mettent le plus souvent en scène l’histoire d’Esther, mais aussi parfois d’autres légendes bibliques comme la Vente de Joseph ou David et Goliath.
Les pièces reprennent toutes la tradition juive du lets, badkhn, nar ou marshelik, c’est-à-dire du maître de cérémonies amuseur, qui assure les transitions d’une partie à l’autre du récit, introduit les personnages et les intermèdes chantés et dansés.
Elles font allusion au vin et à l’ivresse et parodient les textes saints, les discussions talmudiques, les personnages politiques du moment. Les étudiants des écoles religieuses (yeshive-bokherim) y participent.
Des Pourim shpiln revisités
DES CRÉATIONS CONTEMPORAINES
Itsik Manguer écrit la Meguilla d’Itsik en 1936, une suite de poèmes qui transposent l’histoire d’Esther en Europe de l’Est à la fin du XIXe siècle.
Manguer ajoute aux personnages bibliques un atelier de tailleurs, parmi lesquels Fastrigosso, un apprenti-tailleur amoureux d’Esther, qui tente par jalousie d’assassiner le roi. Il pastiche les Pourim shpiln traditionnels puisque les Juifs de son histoire fêtent déjà Pourim et qu’Haman mange des Homentashen. À partir de ces poèmes, Manguer crée avec Shmuel Bunim, Haim Hefer et Dov Seltzer une comédie musicale qui sera mise en scène par Itzhak Shauli puis reprise de nombreuses fois, notamment en 1992 par le Lufteater de Strasbourg, en 1996 à Dresde par le Rock-Theater Dresden, à Tel Aviv en 2010 par Yiddishpil, et à New York en 2014 par le National Yiddish Theater Folksbiene.