Fêter Pourim
LA FÊTE DE POURIM
Le rituel et les pratiques sécularisées
Mardochée mit par écrit ces événements et expédia des lettres à tous les juifs, proches ou éloignés, dans toutes les provinces du roi Assuérus, leur enjoignant de s’engager à observer, année par année, le quatorzième jour du mois d’Adar et le quinzième jour, c’est-à-dire les jours où les juifs avaient obtenu rémission de leurs ennemis, et le mois où leur tristesse s’était changée en joie et leur deuil en fête à en faire des jours de festin et de réjouissances et une occasion d’envoyer des présents l’un à l’autre et des dons aux pauvres. Esther 9, 20-22 (Traduction du rabbinat).
Le Talmud précise le rituel de la fête, qui s’articule en quatre parties :
– Le « jeûne d’Esther » le jour précédant la fête (le 13 Adar),
LA FÊTE DE POURIM (suite)
– La lecture publique de la Meguilla la veille au soir puis dans la journée du 14 Adar,
– L’envoi de cadeaux de nourriture et de dons aux pauvres, le jour de la fête,
– Et finalement un festin au cours duquel il est permis aux hommes adultes de s’enivrer au point de ne pas faire la différence entre maudit soit Haman et béni soit Mardochée.
À la synagogue, lors de la lecture de la Meguilla, le rythme et la mélodie changent selon que sont narrés des événements tristes ou joyeux. Les fidèles tapent du pied, les enfants agitent des crécelles chaque fois que le nom d’Haman est prononcé.
De nos jours, la plupart des communautés religieuses et des associations laïques organisent des fêtes, des concerts, des goûters d’enfants ou des bals costumés.
Le monde à l’envers
L’une des caractéristiques de Pourim est le renversement des valeurs et des fonctions : la licence verbale et la grossièreté sont tolérées, le moins sage est rabbin pour un jour, le riche est pauvre et le pauvre, riche. Cette liberté apparaît souvent dans les Pourim shpiln (די פּורים שפּילן), introduisant grotesque, parodie et satire.
Les nourritures de Pourim
Originaires de l’Europe orientale, les homentashn, די המן טאַשן, (poches d’Haman), petits gâteaux triangulaires fourrés au pavot ou à la confiture, sont les pâtisseries typiques de la fête. Les graines de pavot représentent le « menu végétarien » de la reine Esther qui n’aurait mangé que des graines afin de dissimuler sa judéité sans enfreindre les règles alimentaires. On mange aussi des kreplekh (די קרעפּלעך), pâtes fourrées au fromage ou à la viande « battue » c’est-à-dire hachée – car Haman fut battu.
Sur la table du festin, on sert parfois une grande brioche tressée, la khale (די חלה), qui symbolise la corde avec laquelle Haman fut pendu.
Au Maroc, chaque convive reçoit un boyo, petit pain tressé et farci d’un œuf dur apparent qui représenterait les yeux crevés d’Haman.
On mange aussi toutes sortes de gâteaux, notamment, chez les Juifs séfarades, les travados, pâte levée farcie aux amandes et au miel, cuite au four puis plongée dans un sirop, ou les fazuelos, roulés dans la friture.
Fêter Pourim avant, pendant et après la guerre
Résister et célébrer coûte que coûte
Pourim a été célébré dans les temps les plus difficiles de l’histoire des Juifs.
Au XVe siècle, pendant l’Inquisition espagnole, les marranes continuent à pratiquer le judaïsme clandestinement, alors qu’ils ont été obligés de se convertir au christianisme.
À leurs yeux, Esther est une figure importante puisqu’elle aussi a été obligée de pratiquer en secret. Pour l’honorer sans se trahir, ils l’appellent Sainte Esther ! Imitant Esther, ils célèbrent Pourim essentiellement par le jeûne de trois jours, le plus discret des rites.
« Esther dit pour répondre à Mardochée : Va rassembler tous les juifs se trouvant à Suse, et jeûnez pour moi. Ne mangez ni ne buvez pendant trois jours, nuit et jour. De même moi, ainsi que mes jeunes filles, je jeûnerai, et j’irai ainsi vers le roi en dépit de l’édit, et si je dois mourir, je mourrai. » Esther, 4,15-16
Pendant la deuxième guerre mondiale, les Juifs continuent coûte que coûte à célébrer Pourim, même dans les camps. Au sortir de la guerre, la fête transmet son message originel à travers les survivants, en particulier les enfants, porteurs de l’espoir d’une renaissance de la culture juive foudroyée durant la guerre.